Une limace dans l'herbe? Nope! [Hidalgo]

Un Samedi matin. Très tôt. Aucun gryffon debout à cette heure là. Pas si sûr. Un grand truc émerge de son lit à baldaquin. Un truc à forme humaine. Clignements des yeux. Mise au point sur le monde réel. Et voilà notre Gloss nationale debout, dans son dortoir. Très vite réveillée, et presque aussi vite motivée pour courir. Vérification du temps. Petite bruine fine, vent frais. Pas de quoi décourager une Joke. La demoiselle enfila un petit short blanc, un débardeur rouge puis fit un brin de toilettes. Sans oublier l'étape princiale: les lentilles de contact. Hop, caché les vilais yeux bleus! Place au marron chocolat.

La gryffonceuse dévale les nombreux escaliers sans rencontrer âme qui vive... Si on excepte un fantôme errant au troisième étage. Elle attrape une brioche dans la grande salle, où quelques élèves mal réveillés se noient dans leur jus de citrouille. Quelques regards ébahis se posent sur la folle furieuse qui court vers l'extérieur, et donc logiquement vers sa erte, vu le temps.

Une fois dehors, Gloss inspire puis court. Elle allonge petit à petit ses foulées pour atteindre sa vitesse habituelle. D'ailleurs, sans s'en rendre compte, elle a également emprunté son chemin habituel: le tour du lac. Au fur et à mesure qu'elle court, elle sent l'engourdissement du sommeil s'évanouir de son corps. Des gouttes de pluie perlent sur son visage rosi par le froid. Elle est obligée de ramener ses cheveux derrière ses oreilles. Attacher ses cheveux est quelque chose qu'elle oublie une fois sur trois... Allez savoir pourquoi...

Deux tours du lac plus tard, Gloss s'effondre d'épuisement. Elle adore ce moment où elle sent tous ses muscles ne plus répondre à la moindre de ses demandes, où la seule chose qu'elle puisse faire est s'étaler de tout son long dans l'herbe. Et c'est ce qu'elle fait. On ne la voit pratiquement pas comme ça. Elle sent l'humidité la gagner. Si sa mère était là, elle piquerait une crise internationale... Mais Gloss s'en moque. Elle ne peut plus bouger de toutes façons. Elle ferme les yeux et écoute son coeur battre la chamade, sans penser à autre chose qu'à la petite brise qui chatouille ses cuisses.

Elle sent la terre vibrer. Sûrement quelqu'un. Peu importe. Gloss ne bouge plus.

Les yeux fermés, il est bien plus aisé de ressentir les choses. Et quand il pleut et qu’on est allongé sur le dos, deux possibilités s’offrent à vous: se prendre des gouttelettes dans les yeux ou fermer les yeux. Une personne sensée et saine d’esprit choisit la deuxième solution. Gloss aussi, bien que ces deux caractéristiques ne soient pas celles qui viendraient à l’esprit de quelqu’un qui voudrait décrire la rouge et or. Mais revenons à nos hippogriffes. Les vibrations de la terre s’étaient atténuées, pour enfin s’arrêter. Surprise, Gloss ouvrit les yeux et se rendit bien vite compte d’une présence à ses côtés. Loin d’être une asociale décérébrée, elle voulut très vite savoir qui était debout si tôt le matin, et par un temps si charmant. C’était sans compter son été d’épuisement. Son corps, bien qu’habitué à ce genre de torture refusait de répondre au moindre de ses mouvements. Elle pesta intérieurement contre ses muscles inutiles et si aisément fatigables. La prochaine fois, elle courrait moins... Peut-être.

Gloss rassembla ses pensées aussi embrumées que le ciel. Impossible de réfléchir, avec tant de brouillard dans sa petite caboche. Allez, un petit effort. On reprend ses esprits. On respire un grand coup. Une odeur de cheval lui emplit les narines. Son voisinage proche serait un canasson? Pourtant, elle n’en avait jamais croisé aucun dans l’enceinte du château.

“Bonjour”

Le son retentit dans son cerveau déjà si peu rangé. On rajoute une information. Un canasson qui parle? Pas de quoi s’étonner... Quoi que.
Un éclair de génie réussi enfin à percer la coucher nuageuse de ses penses si troubles. C’était pas un canasson. C’était un prof. Et pas n’importe lequel. Le beau et mystérieux centaure Hidalgo de Mercure. Si le cœur de Gloss était tout entier à Erwan Keys, elle ne pouvait s’empêcher de ressentir un petit quelque chose devant ce professeur si... si centaure! Pas de l’amour. Juste de l’attirance, de la fascination. Peut-être que ses joues rougirent quand elle comprit qui était son voisin, mais elle ne put s’en assurer. La fine bruine l’empêchait de ressentir l’habituelle chaleur que dégageait ses pommettes quand elle était dans ce genre de situation.

Elle se rappelait parfaitement de sa première rencontre avec le professeur. Elle était avec Erwan, qui l’avait croisée au moment où elle se reposait après sa course traditionnelle. Le centaure les avait salués, et Gloss était tout à coup propulsé dans un monde à part... Dans ses pensées en fait. Loin du monde réel. Qui était ce centaure? Que faisait-il seul dans le par de Hogwarts? Elle en discuta toute la journée avec Rah, Erwan et Babyliss sans trouver d’explications convaincantes. Le mystère fut résolu le lendemain: le mystérieux et magnifique centaure était le nouveau professeur de contes et légendes mythologiques. Comme à tous les autres cours auxquels elle assistait, Gloss avait été une élève sérieuse, et attentive, mais surtout fascinée par cet être qui brillait d’une aura si... magique. Il n’y avait pas d’autres termes pour désigner ce que Gloss voyait autour du centaure.

Les mots du centaure la ramenèrent à la réalité.

“Une pomme?”

Oubliant tous ses problèmes musculaires, Gloss se releva rapidement, non sans une grimace de douleur quand ses fessiers la rappelèrent à la dure réalité. Les cheveux dégoulinants, son t-shirt rouge collé à sa peau, son short maculé de vert, ce n’était certes pas dans cet accoutrement que la demoiselle aurait voulu que le professeur le plus sexy de Poudlard lui propose de partager son petit-déjeuner. Cela dit, elle ne fut pas gênée outre mesure. Le simple fait que le centaure lui adresse la parole faisait de cette journée pluvieuse un jour qu’elle allait déclarer fête nationale. Voire internationale.

La rouge et or tendit la main et se saisit de la pomme, tout en examinant son charmant interlocuteur.

“Merci” finit-elle par articuler avant de croquer goulûment dans la chair du fruit rouge.

Elle finit sa bouchée avant d’ajouter:

“Au fait, bonjour professeur. Que me vaut cette visite si matinale? Sûrement le temps si ensoleillé?”

Si Gloss était gênée, elle ne le montrait aucunement. Elle n’allait pas se laisser démonter par ce centaure aux yeux si... Turquoise. Un peu comme les siens en fait. Mais ça le professeur ne pouvait pas le savoir. La rouge et or avait froid. La brise commençait à avoir raison du peu de vêtement qu’elle portait. Heureusement que le monde est bien fait, et que la demoiselle était une sorcière. Elle prit nonchalamment sa baguette et sécha ses vêtements. Les sortilèges informulés ne lui posaient plus trop de problèmes, sauf pour les sortilèges complexes. Elle reporta les yeux sur son professeur, prenant garde à ne psa le fixer trop indécemment.

« Ca rend le poil brillant »

Gloss eut un léger rire. Un rire frais et léger. Sûrement pour se libérer de la tension due à la présence si proche de son professeur. Cela marcha plus ou moins. Elle regarda les gouttes de pluie tomber dans le lac. Un spectacle apaisant. Mais, un spectacle beaucoup plus troublant se trouvait à sa gauche: un visage magnifique, un torse musclé et un corps équin. Ses longs cheveux noirs se collaient sur son visage, et Gloss était intimidée. Juste assez pour qu’elle rougisse, mais pas assez pour la voir s’enfuir au courant. On ne fuit pas, chez les gryffons!

Elle croqua une deuxième fois dans sa pomme quand le centaure continua:

« En vérité je me lève souvent avec le soleil. Peut-être est-ce à vous que je devrais poser cette question. Vous vous levez naturellement, tous les matins avant les autres élèves, pour courir autour du Lac ? Vous avez là un instinct particulier. »

L’adolescente ne put répondre de suite, elle avait la bouche pleine. Situation proprement hilarante en soit, peut-être un peu gênante pour la demoiselle qui avala le plus vite possible, au risque de s’étouffer. Fort heureusement, elle échappa à cette honte extrême. Un instinct particulier? Peut-être. En tout cas c’était la seule manière qu’elle avait trouvé pour se débarrasser de toute son énergie superflue. Son frère avait choisi l’exubérance et la spontanéité, la petite sœur avait opté pour quelque chose de moins fatigant pour son entourage. Pour un centaure, se lever à l’aube était normal, et cela se concevait assez aisément. Mais il est vrai que Gloss Joke avait entendu pas mal d remarques sur sas habitudes que l’on peut qualifier d’indécentes . Se lever si tôt le matin, alors qu’une grasse-matinée était possible? Qui ferait ça? Personne à part une Joke évidemment. Elle se souvint d’un jour, elle devait avoir douze ou treize ans, où elle avait eu le malheur de pénétrer dans le dortoir de ses trois vauriens préférés à six heures du matin. Gloss n’avait jamais réitéré l’expérience. Les tentacules sur la tête, c’est pas très sexy.

Perdue dans ses pensées, elle n’entendit pas les mouvements du professeur et le contact chaud du manteau la surprit. Il était encore empreint de la chaleur corporelle du centaure, et Gloss frissonna de plaisir tout en se pelotonnant dans le grand manteau. Ce professeur était décidément très déstabilisant. Il se mit à parler de son frère et de ses amis. Évidemment il connaissant Bliss Erwan et Rah en tant qu’élèves. Il lui semblait également qu’il entretenait une relation un peu particulière avec son amour secret. Mais cela n’avait aucune importance. Pour une fois, Erwan était le cadet de ses soucis, et c’était sûrement pour ça qu’elle se sentait si bien avec le centaure. Elle lui sourit avec gratitude et dit, pour la deuxième fois:

“Merci
Ou peut-être que je dois dire merci professeur... Même si j’ai l’impression qu’il est déjà trop tard pour ce genre de formules de politesse”

Un sourire plein de malice atterrit sur le visage de Gloss, creusant sous ses yeux deux petites fossettes tout droit sorties de l’enfance. Ses mains enroulées autour de ses genoux, elle se réchauffait petit à petit.

“Vous n’avez pas froid vous? Si vous ne faites plus cours, je serai malheureuse moi...”

Elle s’arrêta vite, se rendant compte que c’était plutôt inapproprié comme réflexion. Pour se donner uen contenance, elle se saisit d’un caillou qui trainait et le jeta dans le lac. La rouge et or continua:

“Je cours tous les matins parce que ça me fait du bien. Tant pour mon corps que pour mon esprit. Je sais pas si c’est un instinct particulier, comme vous dites... Pour moi c’est surtout un moyen de me canaliser, et de me faire du bien... J’ai besoin de ça pour ne pas exploser... Tous les centaures se lèvent à l'aube? Ou vous êtes juste aussi matinal que moi?"

Gloss leva les yeux vers le ciel gris. Une goutte d’eau lui arrive droti dans l’oeil. Et la demoiselle de cligner des paupières pour expédier ce corps étranger. Sa lentille décida de n’en faire qu’à sa tête et de partir loin de son globe oculaire. Peut-être pour vivre une vie libre et sans contraintes allez savoir. C’était sans compter sa propriétaire qui la récupéra dans la paue de sa main. Miss Joke regarda son professeur et se dit qu’elle devait paraître particulièrement ridicule, un oeil marron, l’autre bleu turquoise, ses cheveux trempés et un manteau bien trop grand autour d’elle...
Heureusement qu’être une sorcière facilitait la vie. Elel réhydrata d’un coup de baguette sa lentille fugueuse et sans plus de considération, la remit à sa place.

“Excusez-moi... Pas le temps idéal pour regarder les nuages en fait...”

Au fond d’elle-même, Gloss espérait que l’incident serait passé inaperçu, et qu’ils pourraient discuter d’autre chose... Parler de son changement de couleur d’yeux était quelque chose qu’elle détestait par dessus-tout. Sûrement parce que cela révélait quelque chose de profond dans son caractère et sa personnalité. Elle hésita à partir, pour fuir la discussion... Mais si elle partait, elle renonçait à sa discussion avec le beau centaure. Cruel dilemme. Plutôt faute de forces dans ses jambes, elle resta immobile, à la même place.